Le chancre coloré est un véritable fléau pour les platanes.

Avant tout, que savons-nous du platane ?

Étymologiquement, le platane est appelé « Platanus hispanica synonyme Platanus acerifolia ». C’est un arbre de la famille des Platanaceae. Il possède environ une dizaine d’espèces dont la plus connue est un hybride : le platane commun. Il est très utilisé pour servir d’arbre d’alignement, ornant les places publiques et les rues. L’arbre peut mesurer 25 à 55 mètres en hauteur. Ses caractéristiques varient souvent selon les espèces. Le platane vit assez longtemps. En effet, quand les arbres de platane sont plantés dans un environnement humide, ils peuvent vivre pendant 4 000 ans. L’écorce du platane, sous forme d’écailles, est appelée rhytidomes. Il est assez particulier de par son aspect peau de serpent. Les feuilles de l’arbre, caduques et alternes, sont assez grandes et font 15 à 25 cm de longueur, avec presque la même mesure que la largeur. La consistance est très ferme avec une nervation pédalée. Les fleurs du platane sont toutes petites et n’ont ni calice, ni corolle. Elles sont regroupées en chatons ou en capitules globuleux. Les fleurs du platane fleurissent tôt dans l’année, vers le mois de mai dans l’hémisphère nord. Appelé « akènes », le fruit du platane est velu et regroupé en boules pendantes avec ses congénères. L’akène mûrit en automne. D’une couleur brun rosé, le bois du platane est dur, lourd et ferme. On peut l’utiliser en menuiserie. Parfois, quand certains bois de platane sont coupés de façon oblique par rapport au fil du bois, le morceau de bois prend un aspect moiré après le polissage. Le bois du platane a une ressemblance avec le bois du hêtre, mais il a plus de résistance par rapport au bois du hêtre, à l’humidité. Le platane est originaire de l’hémisphère nord, dans les régions tempérées subtropicales. Des fossiles retrouvés prouvent sa présence à l’époque tertiaire, dans l’actuelle Hongrie.

Dans l’antiquité grecque, les jeunes spartiates s’exerçaient dans des plaines ombragées de platanes appelées, les platanistes. Dans la mythologie grecque, le platane est le symbole de la régénération, de par la forme de son écorce. Selon la légende, le bois du platane aurait servi pour la construction du cheval de Troie. Aussi, un couple célébrant son 61e anniversaire de mariage, célèbre ses « noces de platane ». Dès 1762, le mot platane renvoie au mot « plane ». Plane était l’appellation du platane d’orient. Cela a créé alors une certaine confusion à cause des différentes plantes aux noms similaires comme : l’érable plane, l’érable-platane, et aussi, l’érable faux platane. De plus, les feuilles se ressemblaient beaucoup. Dans le comté du Dorset en Angleterre, le parc de l’école privé Bryanston School abrite un platane hybride baptisé « London Plane ». Il a été planté il y a 269 ans en mémoire du roi Charles 1er, qui aurait connu une mort par décapitation. Présent dans le ‘’Guiness Book of the Records’’, le platane possède une largeur de 6,95 mètres, pour une hauteur de 51 mètres. À partir du XIXe siècle, le mot « platanaie » apparaît dans le dictionnaire. Il désigne une plantation de platanes. La résistance du platane, sa pauvreté en épiphytes et en biodiversité hébergée fait qu’il est très apprécié dans les villes, non seulement pour le décor, mais aussi pour lutter contre la pollution. Ainsi on le retrouve tout au long des rues et de certaines routes.

L’ennemie des platanes

Il est appelé le « Ceratocystis platani ». C’est un microchampignon cousin de l’ennemi des ormes et venu des États-Unis. Il y a été décelé en 1929. Il a profité des opérations militaires vers la fin de la seconde guerre mondiale, pour s’introduire en Europe par la Méditerranée, en voyageant dans les caisses en bois d’armement. Il s’est fait discret pendant une quinzaine d’années, mais dès le début du XXIe siècle, il a envahi l’Italie, la Suisse, le sud de la Grèce et de la France surtout à Lyon, vers le canal du Midi, Toulouse, et beaucoup d’autres régions. En tout en France, 7 départements sont touchés. Ce parasite est la source d’une maladie appelée : « chancre coloré ». Il suffit de quelques spores de ce champignon parasite, introduit dans une infime écorchure de l’arbre, ou alors qu’il y a anastomose racinaire (des soudures entre les racines du platane et les racines des arbres voisins), pour que le platane en entier se retrouve infecté. Dès lors, la durée de l’arbre millénaire se réduit drastiquement à 7 ans au maximum. Chaque année, cette maladie grave tue de beaucoup de platanes. C’est ainsi que le chancre coloré a fait périr plus de 50 000 platanes en France. Malheureusement, il n’y a pas de moyen de lutte efficace contre cette maladie. Ce qui fait que le champignon responsable a été classé ‘’parasite de lutte obligatoire’’. Cela fait qu’en tout temps et en tout lieu, la mise en place de méthodes de luttes et le signalement de tout arbre contaminé est obligatoire. Le chanvre coloré ne touche que les platanes. Installer dans les vaisseaux du bois, le parasite se nourrit de la sève de l’arbre et bouche ses canaux. N’arrivant plus à s’alimenter, l’arbre se dessèche et finit par mourir en moins de 7 ans.

Les facteurs climatiques peuvent faciliter la contamination d’une zone de platane à travers le vent ou la pluie, la taille des arbres, l’utilisation de l’arbre comme d’un support, la présence d’un cours d’eau, un transport de bois contaminés… sont des éléments qui pourraient favoriser ou aggraver une contamination.

Diagnostic et lutte contre le chancre coloré

Pour savoir si l’arbre est contaminé, on vérifie les parties non alimentées. Si l’arbre est contaminé alors on observera des zones nécrosées sur le bois, de couleur bleu violet. Les colorations ont des formes de flamme très diffuses. On les voit mieux quand le bois est mouillé. Cependant, l’écorce du platane reste en place, même si elle devient toute craquelée. Lorsque l’arbre est finalement abattu, on peut observer des stries noires au niveau de la coupe transversale. Mais ces observations ne suffisent pas. La contamination doit être confirmée après analyse d’un échantillon de l’arbre contaminé par un laboratoire confirmé. Dès lors que les experts confirment l’infection du platane au chancre coloré, les services préfectoraux viennent délimiter la zone de contamination. Elle comprend la zone infectée plus une zone tampon. La première zone fait 35 mètres au minimum tout autour des platanes contaminés, et la seconde zone, les communes dans lesquelles se trouvent une ou plusieurs zones infectées.

Afin de lutter contre le chancre coloré, un arrêté ministériel est sorti le 22 décembre 2015. Le chancre coloré a été classé « danger sanitaire de catégorie 1 », et la lutte contre ce fléau est obligatoire sur tout le territoire français. Aussi, toutes les personnes concernées, qu’ils s’agissent : de producteurs de plants de platanes, de propriétaires, de directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, d’entreprises de travaux, ils ont tous l’obligation de surveiller leurs arbres. La présence ou la suspicion de symptômes de chancre coloré, doit être immédiatement déclarée auprès du préfet de la région selon les modalités prévues à cet effet à l’article R. 251-2-2 du code rural. La zone est ainsi désinfectée. En effet, les arbres sont abattus, dessouchés et incinérés sur place, dans un délai de 2 à 6 mois à compter de la date de notification officielle. Le service qui s’en occupe est le service en charge de la protection des végétaux. Une zone ayant subi une infection de chancre coloré, reste interdite de plantation de platanes pendant 10 ans. Le chantier d’abattage des platanes contaminés par le chancre coloré, doit avant toute opération être déclaré à la DRAAF/SRAL. Pour désinfecter la zone contaminée, les produits autorisés sont des phytopharmaceutiques fongicide dont la liste est consultable sur simmbad.fr. La vigilance est de rigueur pour pouvoir déceler rapidement les cas de contamination. Il faut donc surveiller régulièrement les platanes car lorsque la maladie est décelée très tôt, le chancre coloré n’a pas le temps de se répandre sur plusieurs arbres. Notons que des chercheurs de l’INRA ont réussi à avoir des plants qui résistent au chancre coloré. Ils ont obtenu ce résultat grâce à un croisement entre des platanes d’orient et des platanes américains. La nouvelle espèce est appelée « Platanor Vallis clausa ». Il a les mêmes caractéristiques que le platane commun en termes d’ornement, étant lui-même un hybride. Notons aussi qu’une société en Haute-Garonne fait des expérimentations pour un traitement qui pourrait contenir le chancre coloré, ce véritable cancer qui décime les platanes.